Quand la Croix de Savoie se transforme en Croix Suisse dans la nuit… C’est l’événement du week-end à Collonges-sous-Salève. Pour en discuter, la rédaction de Mordus 2 Savoie est partie à la rencontre de Candide, Bugz et Simon, les Héros Savoisiens du week-end, dans le cadre d’une interview exclusive que nous proposons de découvrir dès maintenant.
L’interview de Candide, Bugz et Simon, les Héros Savoisiens du week-end
Mordus 2 Savoie : Salut les gars, est-ce que vous pouvez vous présenter ?
Candide Trodeflex : Salut moi c’est Candide, Savoisien élevé au grain, gros fan de sport et de cailloux enneigés.
Simon : Moi, c’est Simon, adepte de la montagne et plus particulièrement du Salève que j’arpente depuis tout petit.
Bugz : Moi, c’est Bugz.
Mordus 2 Savoie : Dimanche, les habitants de Collonges-sous-Salève ont eu une drôle de surprise : la Croix Savoie était devenue suisse ! Comment l’avez-vous découvert ?
Candide Trodeflex : C’est un collègue qui m’a envoyé un message le matin. J’ai immédiatement envoyé un message aux autres pour organiser la restitution de la Croix
Simon : J’ai découvert la modification de la Croix grâce à d’autres membres du groupe qui m’ont envoyé une photo, et j’ai vérifié, car ça me paraissait invraisemblable.
Bugz : Ma chambre a une vue directe sur le Salève. En me levant le dimanche matin, j’ai constaté directement qu’il y avait quelque chose qui n’allait pas. J’ai cru que c’était un mauvais rêve, mais malheureusement, c’était bien réel.
Mordus 2 Savoie : Quelle a été ta réaction ?
Candide Trodeflex : J’étais un peu énervé au début, puis presque amusé à l’idée de cette guerre naissante et du monde qui commençait à en parler autour. Quand je suis parti en repérage et que j’ai vu l’inscription « Genève CH » directement inscrite dans le rouge du blason, j’ai moins rigolé.
Simon : J’ai été très étonné à plusieurs niveaux :
– Cela fait plus de trois ans que la Croix a été refaite, et au vu du temps passé, je ne pensais pas que des gens s’y attaqueraient.
– Il n’y a eu aucun événement politique particulier entre le Genevois et les Pays de Savoie qui aurait pu motiver ce geste.
– L’endroit est très difficile d’accès, notamment pour repeindre le haut de la Croix il faut une solide notion d’escalade pour pouvoir le faire, ce qui réduisait le risque de ce genre d’incident.
Mais une chose était sûre pour moi comme pour les autres : ça ne resterait pas comme ça bien longtemps !
Mordus 2 Savoie : Combien de temps avez-vous mis pour rétablir notre belle croix ?
Candide Trodeflex : L’enjeu principal était de trouver de la peinture rapidement, afin que les malfaiteurs n’aient pas le temps de contempler leur ouvrage. Ce n’était pas facile le dimanche, lorsque tous les fournisseurs étaient fermés. Nous ne savions pas non plus quel créneau choisir, étant donné qu’une tendance orageuse se profilait. Le travail en lui-même a duré une heure, mais le plus difficile était comme toujours la mise en place. Nous avons officiellement terminé le lundi matin, après avoir acheté de la peinture rouge pour effacer la mention « Genève CH ».
Simon : On a tout d’abord passé du temps à essayer de trouver le matériel pour la repeindre, ce qui était compliqué un dimanche après-midi. Une fois le matériel réuni, on est parti de Collonges vers 19h15 et on était tous chez nous vers 21h30. Le cœur de l’opération sur place a duré une bonne heure.
Bugz : Mes amis étaient déjà sur le coup, nous avons préparé l’opération dans la journée. Il fallait réagir vite pour ne pas laisser le désastre s’installer trop longtemps. Nous avons donc effectué la remise en état l’après-midi. En deux heures, tout était réglé et enfin redevenu normal.
Mordus 2 Savoie : Du coup, toute la nuit une petite équipe était présente pour veiller sur elle ?
Candide Trodeflex : J’ai bien ri quand j’ai vu ça ; les gars sont encore plus déterminés que nous. Dommage, je ne sais pas de qui il s’agit, mais je leur tire mon chapeau.
Mordus 2 Savoie : Quelle est l’histoire de cette peinture ?
Candide Trodeflex : Dans les années 60, des étudiants américains ont peint une croix suisse sur un Salève qu’ils croyaient helvète. Il semblerait qu’aux États-Unis, on boude la géographie et ça ne semble pas dater d’hier ! Plus tard, la croix a été repeinte successivement: quelques fois en suisse, une fois un gros carré rouge moche. Le dernier « incident » qui avait précédé celui de dimanche consistait en un immense « ALBA » peint en noir. Peut-être une déclaration d’amour foireuse ? L’inscription avait été à peu près effacée, mais on en voit encore toujours des traces. En 2020, une belle croix toute neuve a été réalisée. Les réactions étaient alors très enthousiastes ou bien très critiques. Cela se comprend : on est sur un site Natura 2000. Évidemment, si le site était vierge, je serais le premier à critiquer le fait de peindre un emblème quel qu’il soit sur une paroi rocheuse. Cependant, au fil des années, la Croix est clairement devenue un incontournable du Salève. C’est du patrimoine. Le but n’est pas d’inciter les gens à faire de la peinture sur les montagnes. Simplement, ce qui était à l’origine une dégradation est devenu un élément paysager plaisant.
Mordus 2 Savoie : Pour finir, as-tu un mot pour nos amis suisses ?
Candide Trodeflex : J’étais assez triste de lire certaines réactions des deux côtés de la frontière. On sent clairement une ambiance conflictuelle et je pense que s’approprier le Salève des Savoisiens n’était pas la meilleure des idées. Je serais curieux de voir la réaction des Genevois si l’on s’appropriait le Mur des Réformateurs ou le Jet d’eau. Il est clair que les tensions sont vives, du fait de la nature frontalière de la vallée (d’ailleurs les Suisses alémaniques ont exactement le même type de problèmes avec les Allemands). Les Savoisiens (ou Français opportunistes venus d’ailleurs) voleraient les boulots des Genevois. Étonnamment, je n’ai jamais entendu ces mots sortir de la bouche d’une personne sans emploi. Les Savoisiens, quant à eux, accusent les Suisses de venir jeter leurs déchets sauvagement chez nous, de faire leurs courses chez nous et d’augmenter les prix (dédicace au Super U de Collonges)…
Je pense que les deux populations pourraient trouver une manière plus sereine de cohabiter. D’autant plus que nos cultures, nos langues et notre amour de la montagne sont très proches. Il apparaît paradoxal que l’on fasse si peu d’efforts pour s’entendre alors que l’on lit toutes les semaines des articles qui parlent de tolérance et de respect de la différence. On remarque un clair complexe de supériorité de la Suisse vis-à-vis de la France, dont j’ai le sentiment que la réciproque est difficile à trouver. Pour m’illustrer, je prends l’exemple de la Coupe du Monde de Football : une très grosse majorité des Suisses était pour l’Argentine en finale, non pas par affinité avec ce pays en particulier mais tout simplement pour se réjouir de la défaite probable (puis confirmée) des Français. Je trouve ce comportement étrange, étant supporter de la Suisse tant qu’elle ne joue pas contre la France.
En bref, je pense que les cultures alpines sont très chouettes. Les Savoisiens s’entendent très bien avec les copains du Val d’Aoste. Pourquoi pas avec les Genevois ?
Simon : Nous n’avons aucune espèce d’hostilité envers les Suisses, seulement cette montagne est très importante et recèle de nombreux faits historiques importants. Elle est donc chère à notre cœur et apparaît fièrement aux Pays de Savoie, donc inutile de vouloir se l’approprier. Nous vous encourageons au contraire à venir l’arpenter avec respect pour que vous compreniez pourquoi nous l’aimons tant !
Pour aller plus loin, découvrez la version d’un média Suisse :
https://www.watson.ch/fr/suisse/france/415750814-croix-suisse-ou-savoyarde-la-guerre-fait-rage-pres-de-geneve
Bravo pour votre travail de remise en Etat de la croix de Savoie sur le Salève face à ce tartuffe de nos voisins zinzin……..Certainement un coup du Grand Genève……….